Association des éditions Cocagne MAISON DE LA MÉMOIRE & DES ÉCRITURES

Des héros anonymes

24 mars 2022 |  

Des héros anonymes

Mathilde avait projeté de passer la journée avec sa voisine et amie Christine. Marche à pied, restaurant sympa, lèche vitrine, cinéma peut-être… Celle-ci s'est décommandée au dernier moment. Elle avait oublié qu'elle devait garder sa petite fille car sa fille entrait à l'hôpital. Inquiète, Mathilde a voulu en savoir davantage. Maladie, accident ? Pas du tout. Simplement, comme elle donne son sang régulièrement et depuis longtemps, elle avait été repérée et contactée il y a plusieurs années et inscrite sur la liste d'attente des donneurs de moelle osseuse. Les probabilités d'être sollicitée étaient faibles. Il fallait être compatible avec le demandeur et, de toutes façons, ce don n'aurait lieu qu'une fois. Elle serait rayée de la liste, à moins que le malade demandeur ait besoin d'une nouvelle greffe en cas d'échec de la transplantation. Alors que les volontaires sont trop rares et qu'on pourrait faire un don jusqu'à trente ou quarante fois, le protocole français est très strict sur ce chapitre.

Une semaine de congé de maladie, trois jours d'hospitalisation. Avec tout de même une souffrance, certes tolérable, mais présente. Quelles motivations de ce geste pour cette magnifique jeune femme, épanouie dans son travail, heureuse avec sa famille ? Sa mère, infirmière, lui a donné très tôt l'exemple d'une compassion généreuse vis à vis de ceux qui souffrent. C'est, dit-elle, sa façon de remercier la providence. Et elle ajoute «Qu'est-ce que c'est qu'une petite semaine si cela permet de sauver une vie ?» Elle ne connaîtra pas l'identité du receveur. Elle ne saura jamais si sa générosité a permis de lui sauver la vie. Précisons que, comme pour le sang, ce don est gratuit. Elle ajoute qu'il serait bon que le public soit mieux informé sur ces pratiques afin d'être rassuré et de se sentir plus concerné. L'entourage est souvent inquiet. Des croyances erronées persistent, comme celle d'une ponction au niveau de la colonne vertébrale avec des risques importants, alors que le prélèvement se fait dans le bassin.

C'est vrai qu'il conviendrait de parler plus souvent de ces héros anonymes, de leur courage et de leur modestie, dans de multiples circonstances. Merci à eux. Ils sont peut-être plus nombreux que ceux qui défraient la chronique par leurs actes de malveillance. Menez l'enquête autour de vous et  faites-nous part de vos découvertes. Nous leur rendrons un juste hommage dans nos colonnes.