Association des éditions Cocagne MAISON DE LA MÉMOIRE & DES ÉCRITURES

Une leçon de politesse

19 juin 2021 |  

Mathilde a eu besoin de consulter un conseiller juridique afin de mettre ses affaires en ordre et de savoir comment établir un testament. Un ami lui a recommandé quelqu'un d'une grande compétence et aux tarifs certes élevés, mais tout à fait justifiés. Tout d'abord, cet homme de l'art ne l'a reçue qu'après un délai de deux mois. Elle l’a rencontré cette semaine.

Notre amie est très précise dans tout ce qu'elle fait et elle avait, à l'avance, déjà préparé un dossier avec les détails de ce qu'elle souhaitait et les dispositions juridiques correspondantes qu'elle voulait voir compléter ou amender par ce professionnel. 

Dès l'abord, ce monsieur l'a examinée de la tête au pied d'un air assez peu avenant. Mathilde est discrète et modeste dans sa mise et d'un abord très timide. Elle s'est mentalement recroquevillée au fond de ses petits souliers. Avant qu'elle ait l'opportunité de lui adresser la parole, le téléphone a sonné et son interlocuteur a entamé une conversation privée assez longue. Il a ensuite examiné le dossier préparé par elle qu'il a trouvé clair et qu'il a attribué à la personne dont elle s'était recommandée. Elle a tenu à préciser que c'était elle qui l'avait établi mais il a déclaré qu'il n'en croyait rien. Il a à nouveau décroché le téléphone qui s'était remis à sonner pour un échange plutôt professionnel cette fois. Quand ce fut terminé elle commençait à formuler une question qu'elle avait eu le temps de longuement préparer lorsque l'engin retentit à nouveau. Pour une autre conversation privée, voire intime. Avec l'audace propre aux grands timides, Mathilde jaillit de sa chaise, tel un diable de sa boîte, récupéra son dossier et déclara avant de sortir en claquant la porte : «Je ne voudrais pas vous déranger plus longtemps ni être indiscrète : au revoir monsieur. Et merci de ne pas m’envoyer votre facture. Je considère que ce rendez-vous n’a pas eu lieu».

On se plaint du sans-gêne, de l'abus de pouvoir et du manque de délicatesse de certains individus qui se croient supérieur au commun des mortels. Mais ne sommes-nous pas leurs complices ? Si nous étions plus nombreux à réagir comme Mathilde, ne changeraient-ils pas leurs manières ?