30 mai 2024 | Le Billet de Mathilde
En nous retrouvant tous chez Mathilde devant un match de foot à la télé, nous avons été frappés une fois de plus par le très haut niveau de jeu des professionnels sur le terrain – payés, il est vrai, à prix d'or pour être le plus efficaces possible -. Certains, considérés comme les meilleurs, atteignaient une virtuosité hors pair. Mais le résultat – le score – n'était pourtant pas à la hauteur du talent des protagonistes et bien des occasions de conclure ont été ratées. Car chacun jouait pour soi. La compétition, plus qu'entre les deux camps, s'exerçait entre chaque joueur. Aucune solidarité d'action : personne n'était prêt à se «sacrifier» pour qu'un autre puisse aboutir.
Mathilde nous a dit reconnaître là l'illustration magistrale du principe qui régit notre société entière : la compétition. Il faut être le premier, au besoin en écrasant quelques pieds. Dès le plus jeune âge, on réprimande l'enfant qui n'est pas le meilleur. Il faut le succès à tout prix. Alors, deux cas de figure : soit on échoue et l'on se sent comme un moins-que-rien. Soit on remporte tous les succès et l'on se retrouve ensuite sans but. On ne se souvient plus que celui qui réussit, par rapport à celui qui perd et renonce, a échoué une fois de plus et a recommencé quand même.
Quant à la victoire, elle n'est jamais aussi éclatante que lorsqu'elle est collective. C'est alors joie, gratitude et bonheur partagés au lieu de suffisance, morgue d'un côté, amertume et jalousie de l'autre. L'homme est un animal social qui ne survivrait pas sans ses semblables. Or on veut nous faire croire que tout se conjugue et se vit sur le mode singulier, à la première personne. Avec, en prime, la solitude.