Association des éditions Cocagne MAISON DE LA MÉMOIRE & DES ÉCRITURES

L’amour tout simplement

26 novembre 2021 |  

L'amour tout simplement

Il y a une quinzaine de jours, Eva, l'amie de toujours de Mathilde – et par conséquent la nôtre également – lui a rendu visite, bouleversée. Un fils leur est né à peu près en même temps, à un mois près. Celui d'Eva est venu annoncer à sa mère qu'il avait rencontré le grand amour. Jusque-là, il ramenait toujours à la maison des filles plus belles et plus charmantes les unes que les autres. Jamais deux fois la même. Il avait acquis, ainsi, la réputation d'un Don Juan impénitent. Sa mère s'est réjouie de la bonne nouvelle avec l'espoir de devenir – enfin – grand mère. Et là son fils a poursuivi ses confidences. Cet amour-là était un homme. Il a l'intention de s'installer avec son nouvel ami et sans doute de se marier. Eva a eu l'impression de recevoir le ciel sur la tête. Devant l'air inquiet de son fils, elle a fait un énorme effort et lui a déclaré que l'essentiel pour elle était de le voir heureux. Et là Alain lui a dit qu'il différait depuis longtemps son aveu, persuadé qu'elle allait le rejeter, comme cela arrivait souvent dans pareil cas. Elle a précisé que cela ne changeait rien à ses sentiments pour lui et que sa confiance la touchait profondément. Elle a ajouté qu'elle aimerait rencontrer l'heureux élu. Il est curieux de constater comment un sujet d'actualité, qu'on croit aux antipodes de son monde personnel, peut faire ainsi irruption dans votre quotidien. Il s'agit ici du mariage des homosexuels et de la possibilité, pour eux, d'adopter des enfants. Mathilde en conclut que si tous les bien-pensants, souvent religieux sincères et pratiquants, violemment opposés à cette loi, prenaient la peine de rencontrer des couples dans cette situation, leur conviction pourrait évoluer vers davantage d'ouverture. Longtemps les homosexuels furent punis de prison ou exécutés (c'est encore le cas dans certains pays), puis soignés comme des malades mentaux. Sous le régime nazi, les homosexuels devaient porter un triangle rose alors que les Juifs avaient une étoile jaune. Ils étaient déportés. Ne pourrait-on dépasser cette discrimination d'un autre âge ? Je ne demande à personne de renoncer à ses convictions. Des rigidités irréductibles se partagent entre les deux camps. Il serait simplement souhaitable que chacun puisse parler à l'autre pour exprimer ses peurs et ses réticences, dans le respect et la dignité.