29 février 2024 | Le Billet de Mathilde
D'après la Banque de France, le nombre de ménages endettés a triplé en dix ans. Mais on ne comptabilise là que ceux qui ont saisi la commission de surendettement. On peut facilement doubler le chiffre jusqu'à plus d'un million et demi de foyers, en prenant en compte ceux qui ne veulent pas perdre la face et pensent pouvoir s'en sortir et jongler en faisant de nouveaux crédits, par exemple.
Autre évolution. Les personnes surendettées étaient de conditions modeste. Ce fléau concerne de plus en les classes moyennes. Un deuil, une séparation, une maladie et l'engrenage infernal se met en route. A l'occasion d'une gêne financière passagère on est charmé par une de ces publicités de plus en plus agressives et insidieuses qui nous cernent et envahissent l'espace médiatique. Jusqu'aux cartes de fidélité des grandes enseignes qui se transforment d'un seul coup en crédit revolving.
A quarante ans, après une alerte de santé qui s'est terminé pour le mieux, le fils de Mathilde a voulu aller à Bali. C'était le voyage de noces qu'ils avaient prévu de faire au début de leur histoire avec son épouse, mais l'arrivée plus tôt que prévue de leur fils aîné, si elle les a comblés de bonheur, a bousculé leurs plans. Après son infarctus dû à une surcharge de travail et de stress ils ont conclu que mieux valait profiter de la vie tout de suite et ils ont pris un crédit alléchant pour s'offrir leur rêve. Au retour il s'est retrouvé dans un poste moins chargé d'activité et aussi moins bien payé. Les échéances à un taux d'usure difficiles à régler puis les retards pénalisés par des intérêts encore plus lourds, ils se sont retrouvés dans l'impossibilité de faire face. Quand ils ont fini par en parler à Mathilde, elle leur a donné toutes ses économies qu'elle gardait «au cas où…». Mais tout le monde n'a pas une mère qui peut ou qui veut aider sa progéniture.
Il s'agit là, par son ampleur, d'un phénomène de société très préoccupant et auquel il faudra bien trouver des solutions.