6 mars 2025 | Le Billet de Mathilde
Mathilde a dû prendre sa voiture pour une course urgente à l'heure de la sortie des bureaux – ce qu'elle ne fait jamais – et, dans un embouteillage, la voiture qui la suivait a oublié de freiner. Le choc l'a projetée en avant et elle s'en est tirée avec mal à la nuque pendant quelques jours. Ce qui aurait été bien pire si elle n'avait pas mis sa ceinture. Le conducteur fautif s'est aussitôt précipité… son portable la main. Il était en train de téléphoner.
L'automobiliste est alors moins concentré sur sa conduite. La meilleure solution pour éviter tout accident et toute sanction est de couper son téléphone (car la sonnerie peut surprendre) ou de demander aux éventuels passagers de répondre. Sinon, il suffit de s'arrêter dans un lieu adapté. Deux conducteurs sur cinq téléphonent au volant. Une enquête récente révèle que près de la moitié des automobilistes décroche son appareil dans les deux secondes, et donne ainsi la priorité à cette tâche. Le temps de réaction en cas de danger augmente très sensiblement jusqu'à 70% et le risque d'accident est multiplié par quatre.
La loi pénalise ce comportement : « L'usage d'un téléphone tenu en main par le conducteur d'un véhicule en circulation est interdit et puni de l'amende prévue pour les contraventions de la deuxième classe (35€) et par la réduction de deux points du permis de conduire. » En multipliant ce chiffre par le nombre de contrevenants impunis qui croisent notre route chaque jour, ce serait là une source de revenus quasiment inépuisable pour le gouvernement.
Cet envahisseur a pris possession de notre vie, même la plus intime, depuis peu de temps, et ça s'aggrave. Dans le train, en réunion, aux spectacles (bien qu'ils soient tous précédés, à présent, d'une mise en garde), dans les rayons des supermarchés (Dis, chérie, qu'est-ce que je prends comme marque de produit vaisselle), aux WC, je suppose… Dès son plus jeune âge, l'enfant est sous haute surveillance et sa mère l'appelle pour un oui, pour un non… La communication s'améliore-t-elle entre les êtres pour autant ? A entendre – sans le vouloir – l'indigence des propos échangés, on peut craindre que non. Dans la rue, deux piétons sur trois ont leur téléphone portable collé à l'oreille.
Sommes-nous suffisamment raisonnables pour pouvoir nous priver de nos nouveaux joujoux, même pour un court instant ? Chacun de nous serait d'accord pour appliquer cette interdiction aux autres avec toujours une bonne raison pour ne pas la respecter soi-même.